Colloque annuel

36ème colloque de l’ADMEE-Europe du 8 au 10 janvier 2025
Université du Luxembourg, Belval (Luxembourg)

Paradoxes de l’innovation en évaluation au 21e siècle

Le monde contemporain est marqué par des changements rapides qui affectent les modèles de gouvernance politique, les modèles économiques ainsi que la société dans son ensemble. Dans le domaine de l’éducation, cela s’exemplifie par l’avènement de l’intelligence artificielle ou encore par l’émergence d’écologies d’apprentissage innovantes. Ces changements, censés améliorer la qualité de l’enseignement et par conséquent de l’évaluation, produisent parfois des effets contraires, voire pervers. Par ailleurs, de nombreuses personnes dans le champ de l’éducation se sentent impuissantes face à ces changements radicaux et parfois abrupts. Elles s’interrogent sur la pertinence de ces changements et sur la manière de les intégrer dans leurs pratiques évaluatives.

Partant de ce constat, le colloque examinera une diversité de systèmes, de dispositifs et d’outils innovants : intelligences artificielles, plateformes d’enseignement à distance et systèmes hybrides, open-badges, micro-crédits ou encore évaluation des soft skills. La manière dont ils peuvent être intégrés dans les processus pédagogiques sera notamment mise en discussion. Nous avons identifié cinq domaines majeurs touchés par ces changements :

  • – Les technologies au service de l’évaluation.
  • – Les innovations en matière d’évaluation dans l’enseignement supérieur.
  • – Les innovations en évaluation dans l’orientation, la sélection, la formation et l’insertion professionnelle.
  • – La conciliation de la qualité et de l’équité dans la gestion des publics hétérogènes.
  • – La régulation des systèmes éducatifs et scientifiques.

Le thème du colloque et les axes de travail sont ainsi étroitement alignés sur les préoccupations de la recherche en éducation de ce début du 21e siècle. Ces axes se focaliseront notamment sur l’étude des paradoxes liés à l’utilisation des outils et technologies numériques pour l’évaluation des compétences transversales dans l’apprentissage tout au long de la vie, à la conception des dispositifs d’enseignement hybrides dans l’enseignement supérieur, à l’introduction des environnements d’apprentissage améliorés numériquement pour la gestion des publics scolaires hétérogènes et multilingues et, enfin, à l’évaluation et à la régulation des systèmes éducatif et scientifique censés répondre aux besoins sociétaux.


Le thème du colloque sera abordé à partir de cinq axes thématiques :
  • Axe 1 : Les technologies au service de l’évaluation
  • Axe 2 : Les innovations en matière d’évaluation dans l’enseignement supérieur
  • Axe 3 : Les innovations en évaluation dans l’orientation, la sélection, la formation et l’insertion professionnelle
  • Axe 4 : La conciliation de la qualité et de l’équité dans la gestion des publics hétérogènes
  • Axe 5 : La régulation des systèmes éducatifs et scientifiques

Axe 1 – Les technologies au service de l’évaluation
Les récentes avancées technologiques mises largement à disposition, telles que les intelligences artificielles génératives (Large Language Model ; LLM), mais aussi les méthodes d’exploitation des données collectées en ligne ou dans des interfaces numériques (data analytics) présentent un potentiel de bouleversement des pratiques évaluatives dans les champs éducatif et formatif. Une tension se fait jour entre la recherche d’exploitation du potentiel de ces technologies (considérant le caractère de l’outil comme incontournable) et la crainte des écueils éthiques et des effets délétères de ces technologies (tricherie, diminution de la créativité ou de l’effort personnel). L’évaluation est remise en question dans ses modalités, mais aussi dans ses objets.

Dans cet axe, des questions variées pourraient être traitées, telles que : Comment les avancées technologiques impactent-elles les pratiques évaluatives et les pratiques estudiantines ? Comment devrait-on intégrer de manière éthique les avancées technologiques dans l’évaluation ? Comment éviter que ces technologies ne contribuent à tricher ? Comment diversifier nos méthodes d’évaluation pour tirer profit des avancées technologiques ?

Axe 2 – Les innovations en matière d’évaluation dans l’enseignement supérieur
L’enseignement supérieur a connu des changements majeurs ces dernières années. Tous ces changements ont transformé l’environnement d’apprentissage techno-pédagogique et traditionnel en une écologie d’apprentissage hybride. Par ailleurs, des changements radicaux dans les pratiques pédagogiques sont survenus à la suite de l’épidémie de covid-19. Si l’enseignement à distance est devenu en quelques jours la nouvelle norme, force est de constater que l’évaluation en ligne pose des problèmes importants en matière de cadre conceptuel et institutionnel, d’outils, de validité et de sécurité. Ainsi, contre toute attente, les problématiques liées à l’évaluation dans les apprentissages hybrides ou essentiellement à distance sont plus que jamais d’actualité à la lumière des évolutions récentes de notre société.

Sous quelles conditions les technologies peuvent-elles être intégrées dans les systèmes de formation hybrides pour évaluer les apprentissages et la qualité des enseignements ? Quelle problématique évaluative pose une écologie d’apprentissage hybride ? Comment assurer la qualité des évaluations ?

Axe 3 – Les innovations en évaluation dans l’orientation, la sélection, la formation et l’insertion professionnelle
Dans tous les secteurs d’activités, les acteurs de la formation et de l’insertion socio-professionnelle s’accordent sur la pertinence d’intégrer dans les parcours d’apprentissage des «savoir-faire comportementaux» en situation professionnelle – appelés communément «soft skills». L’impact de la crise sanitaire a remodelé brutalement notre monde du travail. Chacun.e a dû se réinventer, faire preuve d’adaptation et de réactivité. Ce contexte insécurisant, provoquant un repli sur nous-mêmes, a également engendré, par réaction, un besoin renforcé de mise en réseau, de coopération et de contacts sociaux. Ceci est d’autant plus important pour les personnes plus fragilisées socialement comme les personnes en recherche d’emploi et les adultes en formation peu qualifiés. La mise en évidence du concept de «soft skills» a renforcé les besoins d’une évaluation et d’une reconnaissance répondant aux critères de qualité suffisants pour étayer des décisions prises au sujet des personnes.

Ainsi, l’évaluation des soft skills, le recours aux open badges et aux microcrédits sont aujourd’hui des préoccupations majeures tant dans le monde de la formation professionnelle que dans l’enseignement supérieur.

Comment ces concepts et outils innovants peuvent-ils être intégrés aux formations pour améliorer l’insertion sociale et professionnelle des apprenants ? Quelle est la reconnaissance des soft skills et de leurs dispositifs ou outils d’évaluation sur le terrain ?

Axe 4 – La conciliation de la qualité et de l’équité dans la gestion des publics hétérogènes
Cet axe porte sur des questions interrogeant la qualité de l’éducation et de la formation. Cette notion est aujourd’hui mobilisée par une multitude d’acteurs dont les visées sont diverses. Notamment, la qualité est un paramètre incontournable dans l’évaluation et l’amélioration de l’enseignement pour tenir compte de publics de plus en plus hétérogènes. Solliciter des indices sur cette qualité auprès des publics en formation offre un potentiel de progrès pédagogique et ainsi un soutien au développement des apprentissages, voire à la lutte contre les échecs et abandons de formation. Au niveau de la gestion des systèmes de formation, les démarches qualité permettent d’assurer des prestations répondant aux besoins des publics et aux objectifs politiques. Dans un monde d’«accountability », la qualité est ainsi un sujet d’étude incontournable.

Parmi les questions qui pourraient être abordées dans cet axe, mentionnons : comment évaluer la qualité auprès de publics hétérogènes ? Comment la qualité varie-t-elle et quelle signification prend-elle selon les contextes, les publics ou encore les enseignants et formateurs ? Quels outils et processus peuvent favoriser la régulation de la qualité ? Comment concilier équité et qualité en tenant compte de l’hétérogénéité des publics ? Peut-on se permettre d’ignorer l’équité dans l’évaluation de la qualité ?

Axe 5 – La régulation des systèmes éducatifs et scientifiques
Dans les pays industrialisés, les politiques traditionnelles de gestion de l’éducation sont progressivement remplacées, du moins dans une certaine mesure, par des politiques de régulation centrées sur la responsabilisation, la gestion axée sur les résultats et la mise en œuvre d’outils d’assurance qualité.
br/>Ces dispositifs contribuent-ils effectivement à l’amélioration de la qualité de l’enseignement non seulement en matière de compétences académiques, en vue du développement économique, mais aussi sur le plan des compétences citoyennes, en vue du développement humaniste de nos sociétés ? Comment les résultats de ce type dispositifs d’évaluation peuvent-ils être exploités à un niveau micro par les enseignants ou à un niveau macro par les pouvoirs organisateurs de l’enseignement pour améliorer la qualité des systèmes éducatifs ?

Un constat analogue peut être dressé quant aux régulations des productions scientifiques. De nouveaux modèles de publication en sciences humaines ont vu le jour ces dernières années, qui remettent en question des pratiques traditionnelles (sciences ouvertes, arbitrages « non aveugles », publications rapides …). À l’heure des revues prédatrices, comment mettre à profit ces nouveaux modèles pour maintenir et renforcer la qualité des productions scientifiques ?



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